Écrit en 1949, publié l'année suivante, ce «grimoire» nous convie à la traversée d'un quartier incorruptible au sein d'un monde qui s'écroule : celui de Saint-Germain-des-Prés. C'est sous des oripeaux poético-sociologiques que se révèle ce ghetto halluciné et déroutant, « bague au doigt de Paris ».
En une vision quasi mythologique, Pomerand en restitue les beuglants, les voyous, les ivrognes, l'église - « l'unique sauvage du quartier»-, les putains intellectuelles, le jazz et les « pouètes » (on y croise notamment Cocteau, Vian ou encore Sartre).
En regard de ce long poème ardent qui préfigure les expérimentations de la beat generation, l'« Archange» Pomerand donne quarante-sept planches métagraphiées: manières de rébus faisant chanter les signes, elles viennent habiller le texte et lui insuffler une symbolique nouvelle, donnant à cette œuvre majeure le ton d'« un cran d'arrêt dans le verbiage ».
Gabriel Pomerand (1925-1972), «l'ange noir de Saint-Germain-des-Prés (Sarane Alexandrian), a vingt ans lorsqu'il participe, aux côtés d'Isidor Isou, à la fondation du lettrisme, ce mouvement d'avant-garde qui influen cera Guy Debord et ouvrira le champ de la poésie sonore et concrète. Il es l'auteur d'une douzaine d'ouvrages, dont Lettres ouvertes à un mythe (1949 Les Méditations d'un bâtard (1949), Les Puérils (1956) et D.Man (1966), que les éditions du Sandre désirent remettre en lumière ces prochaines années.